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Banques Infos Recours accompagne les particuliers en litige avec leur banque, dénonçant régulièrement sur
son site et sa page Facebook les irrégularités afin d’obtenir des solutions à l’amiable. Et ça marche.
Il y a trente ans, un couple de
Rochelais de Port-Neuf, en grave
difficulté financière, se voit saisir
sa maison par sa banque afin de
rembourser une partie de la dette.
Entre les intérêts et les frais bancaires
qui s’accumulent, ils continuent à
rembourser, en 2019… l’emprunt
de la maison ! A ce jour, ils auraient
payé le double de la dette d’origine.
Un fromager rochelais, qui avait
une affaire qui tournait plutôt bien
(120 000 € de chiffre d’affaires),
réclame en 2017 à sa banque un
découvert de 5000€ afin d’assurer,
en période creuse, le roulement de
son stock de fromages. Refus de la
banque, qui, au lieu de ça, lui facture
20 000€ de frais bancaires en trois
ans, précipitant la société vers la
liquidation. Ou encore ce couple de
Port-Neuf, fiché Banque de France
pour un surendettement, et à qui la
banque demande 1300€ de frais.
Point commun de ces personnes ?
Livrées à elles-mêmes face à leur
banque, elles ont fait appel à Banques
Infos Recours (BIR), association créée
en juin 2018 par un Charentais-
Maritime résidant à Marennes. A son
compte dans le secteur du bâtiment,
Sébastien Alaire ne peut plus pour-
suivre son activité en raison de gros
problèmes de dos. Heureusement, il
a souscrit auprès de sa banque une
assurance qui couvre « l’aléa santé
professionnelle », sauf que rien ne va
se passer comme prévu. « Alors que la
MDPH*
a établi mon handicap entre
50 et 80%, l’assurance a estimé qu’il
n’était que de 5% et a donc refusé
de le prendre en charge », explique
Sébastien Alaire, qui a décidé de lan-
cer une procédure judiciaire, toujours
en cours. Dans un premier temps, il
décide de rechercher des personnes
ayant connu la même déconvenue (une
soixantaine à ce jour), puis découvre
l’ampleur des litiges opposant les par-
ticuliers aux banques.
Ne plus avoir peur
Il y a les grosses « affaires », comme
celles évoquées ci-dessus, et puis il y a
le quotidien de milliers de personnes,
souvent désemparées. « Nous
assumons une communication
volontairement impertinente,
car il faut que les gens cessent
d’avoir peur des banques »,
explique Sébastien Alaire, qui
s’est entouré de nombreuses
compétences (juristes, avocats,
comptables etc) pour lever les
lièvres. Régulièrement rappelées
à l’ordre, les banques françaises
ont été invitées par le législa-
teur à modifier leurs pratiques,
à l’image du décret du 30 juin
2014 qui leur impose de limiter
les frais à 20 euros par mois pour
les plus fragiles. Or, Banques
Infos Recours reçoit régulière-
ment des plaintes de clients pour les-
quels cette règle n’est pas appliquée.
« Ça n’intéresse pas les banques de
prendre 200€ quand elles peuvent
prendre 1000, 1500 voire 2 500 €
par an dans certains cas, argumente
Sébastien Alaire. Imaginez, pour une
personne de la classe moyenne, c’est
l’équivalent d’un mois de salaire ! »
De 12 à 15€ la lettre
Il y a aussi les centaines de milliers de
Français ayant du mal à boucler leurs
mois, et qui se retrouvent sur un fil
à partir du 20 du mois, où chaque
imprévu peut venir grever le bud-
get. Problème de santé, perte d’un
emploi, divorce : autant d’accidents
de parcours dont il est difficile de
se relever, surtout quand les décou-
verts s’accumulent sur le compte en
banque. « C’est un effet boule de
neige, avec un enchaînement souvent
catastrophique. Si vous n’avez pas un
peu d’argent de côté, le découvert se
reporte avec les frais qui vont avec »,
déplore l’empêcheur de tourner en
rond. Là encore, la loi Murcef du 11
décembre 2001 oblige les établisse-
ments bancaires à envoyer un courrier
à leurs clients en cas de découvert,
ce qu’elles font à travers une Lettre
d’Information Préalable… facturée de
12 à 15€. « Je sais que le timbre est
très cher, mais qu’est-ce qui justifie
ce type de méthode ? », interroge le
fondateur de BIR.
Grâce à l’ampleur prise par sa page
Facebook (15000 abonnés, 150000
à 1 million de vues chaque mois et
des centaines de « like » pour cer-
taines publications) et une commu-
nication mordante, Banques Infos
Recours obtient la plupart du temps
une solution à l’amiable, les banques
étant soucieuses de ne pas écorner
leur image. « Il s’agit d’éviter les
procédures judiciaires, sauf quand il
n’y a pas le choix. Nous leur deman-
dons simplement de respecter la loi,
ni plus ni moins », ajoute Sébastien
Alaire. La force de l’association est
de réunir, selon les dires de son créa-
teur, un « cocktail explosif » de clients
mécontents, d’employés de banque
« écœurés » et « qui veulent pouvoir
se regarder dans la glace », voire de
certains anciens directeurs d’agences
bancaires. Des « lanceurs d’alerte »
qui prennent de gros risques pour
informer le grand public, mais qui
apportent sans cesse de l’eau au mou-
lin de Banques Infos Recours.
Taux peu rémunérateurs
Alors que les banques s’étaient enga-
gées à faire des « efforts » après les
remontrances du ministre de l’Écono-
mie Bruno le Maire1, l’association a
prouvé, chiffres à l’appui, que les frais
étaient toujours constants, en s’ap-
puyant sur la « fuite » d’un document
de l’agence régionale d’une grande
banque française : 1,6 million d’euros
de frais prélevés sur les particuliers et
1,35 million d’euros sur les clients pro-
fessionnels uniquement sur le mois de
mai 2019. Une autre grande banque
verra ses chiffres diffusés sur la toile
dans les prochaines semaines, révélant
que rien n’a vraiment changé, alors
que le faible niveau des taux d’inté-
rêts (peu rémunérateurs) incite les
banques à trouver d’autres sources de
revenus pour maintenir leurs marges…
Parfois, ce sont les sociétés de recou-
vrement qui prennent le relais, har-
celant le particulier pour l’inciter à
payer. Comme ce Rochelais, mis en
demeure de rembourser un découvert
de 1500€ datant de 2014, alors que
l’article 218-2 du code de la consom-
mation considère qu’une dette est for-
close au bout de deux ans. « C’est une
pratique très courante. Les banques
revendent des dettes à des sociétés
de recouvrement pour 10% de leur
valeur, et ces dernières font tout pour
récupérer l’intégralité de la somme,
même au-delà des deux ans », déplore
Sébastien Alaire.
Depuis quelques mois, la structure
milite pour que davantage de per-
sonnes bénéficient de la limitation des
frais d’incidents de paiements, loi qui
ne bénéficie qu’à un million de clients,
quand la Fédération Bancaire Française
estime que 3,4 millions pourraient y
prétendre. « L’INSEE vient de publier
le chiffre de 9,3 millions de Français en
dessous du seuil de pauvreté. Pourquoi
la tarification minorée ne bénéficierait
pas à cette catégorie ? », questionne
Sébastien Alaire, qui s’active auprès de
députés sensibles à son engagement.
Une politique de frais d’autant plus
contestable que la banque fait déjà
crédit, à des taux très élevés, du décou-
vert, et se rémunère donc grassement
dessus. « C’est une sorte de double-fac-
turation, c’est un scandale », conclut
celui qui n’a pas fini de demander des
comptes aux banques.
Mathieu Delagarde
*
Maison Départementale des Personnes
Handicapées.
(1) Interview du ministre le 3 septembre 2018
sur BFM TV.